Les pèlerinages à Laurie et au Bru de Charmensac
Tout le Moyen-Age a été marqué par des cohortes de pèlerins en marche vers la Terre Sainte où Saint-Jacques de Compostelle. Un pèlerinage a toujours constitué une parenthèse, une rupture entre la vie quotidienne du pèlerin et ce rendez-vous dans un lieu précis. Deux pèlerinages traditionnels existent dans la vallée de Sianne : à Laurie le lundi de Pentecôte et au hameau du Bru (Charmensac) le dimanche qui suit la Saint-Jacques le 25 juillet.
Un pèlerinage a toujours constitué une parenthèse entre la vie quotidienne du pèlerin et ce rendez-vous dans un lieu précis. Le pèlerinage de Laurie procède du même élan : marcher ensemble vers un lieu sacralisé où le temps n’a pas la même valeur.
La Tradition situe le premier pèlerinage au 12 Juin 1318, un lundi de Pentecôte à la suite d’un voeu des habitants de Blesle. Mais, il est fort probable qu’avant cette date la Vierge de Laurie rassemblait régulièrement autour d’elle des pèlerins venus des villages aux alentours et même d’une partie de l’Auvergne. S’il n’y avait pas eu ce terrible incendie de l’Abbaye de Chantoin à Clermont le 25 Août 1699, où étaient conservés la plupart des titres de Laurie, nous en saurions davantage...
Les documents parvenus jusqu’à nous révèlent qu’il n’y avait guère de processions à Notre-Dame de Vauclair, près d’Allagnon (Molompize), qui ne se rendent aussi à Laurie.
On sait également que les moines de Chantoin qui ont administré le sanctuaire jusqu’en 1633, l’entretenait à grands frais, mais qu’ils recevaient aussi dons et offrandes. La vente des cierges et des chandelles pour l’église leurs procurait de confortables revenus..
Pendant la Révolution, le pèlerinage souffrit de la déchristianisation des campagnes, orchestrée par les autorités révolutionnaires et des contestations entre le clergé constitutionnel et les prêtres réfractaires.
La loi du 11 avril 1796 (22 Germinal, an IV) interdisait notamment tout signe de religion, les convocations d’assemblées... Mais l’église de Laurie ne connut pas les destructions d’Auriac (clocher, mobilier, objets sacrés).
L’Abbé Glaize, dans son livre de comptes, rapporte que le lundi de Pentecôte 1796, « une vingtaine de femmes de Blesle, du parti des réfractaires, bravant les interdictions, arrivèrent à Laurie en procession, entrèrent dans l’église et chantèrent des cantiques pendant près de deux heures » sans être inquiétées.
Après la période révolutionnaire et ses bouleversements, Blesle repris son pèlerinage annuel, mais sans grande solennité ; Le curé de Laurie fit appel au Chanoine Pau, un orateur de talent. Il vint pour la première fois à Laurie présider le pèlerinage de 1884. Il suscita à Blesle comme à Laurie un nouvel élan religieux. En 1887, plus de huit cents pèlerins participèrent aux cérémonies..
Ce renouveau des pèlerinages a eu lieu partout en France dans la deuxième moitié du 19ème siècle.
Depuis la révolution, le programme du pèlerinage du lundi de Pentecôte n’a guère varié : une messe le matin, une réunion de prière l’après-midi et des moments libres devant l’autel de la Vierge recouvert de fleurs....
La tradition persiste encore aujourd’hui, et chaque lundi de Pentecôte Laurie accueille ceux qui portent une attention particulière au culte de Notre-Dame de Laurie, la Vierge du Pays de Sianne.
L’histoire du culte de la Vierge de Laurie démarre au 12ème siècle, époque de la création de l’oeuvre originale de la Vierge en majesté. Témoignage de foi et de savoir-faire, la statue a fait l’objet d’un culte permanent à Laurie depuis plus de 800 ans.
Un village, une église, une Vierge en majesté
200-300 (3ème siècle)
L’évêque Mary, évangélisateur de la Haute-Auvergne parcourt les environs de Massiac et fonde des communautés chrétiennes
1000-1100 (11ème siècle)
Recomposition des pouvoirs sur la base de chatellenies et de paroisses
L’existence du village de Laurie est constatée sous le nom de Lauriacus dans un terrier (conservé à la Bibliothèque Nationale)
1100-1200 (12ème siècle)
1150 :La gestion de la paroisse de Laurie est confiée aux Chanoines réguliers de Saint-Augustin du monastère de Chantoin (Diocèse de Clermont)
– Robert d’Auvergne durant son règne confirme les droits du monastère de Chantoin sur la petite église de Laurie.
1200-1300 (13ème siècle)
Création d’une statue de la Vierge en majesté en bois polychrome de 67 centimètres de hauteur par un artiste inconnu. Selon la tradition la statue est vénérée dans un petit oratoire au Martulet, près d’un village d’origine gallo-romaine (village attesté par les fouilles archéologiques). Elle sera transférée plus tard à la fontaine du Roulier.
1300-1400 (14ème siècle)
1303 : Un terrier mentionne des réparations à l’église de Laurie en très mauvais état.
1317 : Le Diocèse de Clermont est démembré. Laurie et Blesle sont rattachés au nouveau Diocèse de Saint-Flour, mais les chapelains de Laurie continuent à relever du monastère de Chantoin.
1318 : Vœu de la ville de Blesle pour obtenir la fin de la peste et pèlerinage à Laurie le lundi de Pentecôte, selon des textes anciens controversés.
1400-1500 (15ème siècle)
1483 :Un acte juridique du Pape (Bulle) datée du 26 février incorpore l’église de Laurie sous la responsabilité du monastère de Chantoin à Clermont-Ferrand
1500-1600 (16ème siècle)
1542 :Témoignage écrit d’un jeune couple originaire de Murat en pèlerinage à Laurie attestant de l’existence d’un pèlerinage
1600-1700 (17ème siècle)
1633 :Les Chanoines de l’abbaye de Chantoin sont remplacés par ceux des Carmes-Déchaussés (toujours à Clermont) pour diriger la paroisse de Laurie
1646 :Le Prieur de l’abbaye de Prébac (Haute-Loire), Jacques Branche, vient enquêter à Laurie sur l’histoire de la statue et sur les faits miraculeux qui s’y rapportent
1652 :Parution du livre de Jacques Branche qui relate pour la première fois par écrit l’histoire de Notre-Dame de Laurie, placée sous le vocable de « Consolatrice des affligés » et signale la couleur noire de son visage
1660 : Le sanctuaire de Laurie passe définitivement sous la juridiction de l’évêque de Saint-Flour, Monseigneur de Montrouge
1661 : Antoine Martin est nommé premier Curé de Laurie en remplacement du moine provenant de l’Abbaye de Chantoin depuis plus de cinq siècles
1699 :Le mardi 25 août un incendie détruit une partie des archives du monastère des Carmes Déchaussés à Clermont dont celles du sanctuaire de Laurie
1700-1800 (18ème siècle)
1770 :Un paysan de Lugarde (près de Marcenat) qui possédait l’art de lire les vieux textes dicte sa lecture de « La Charte de Laurie » à partir d’un document ancien
1789 :Pendant la Révolution, le pèlerinage est supprimé conformément à la politique de déchristianisation de la Convention
1796 :Le lundi de Pentecôte, une vingtaine de femmes de Blesle arrivent en procession à Laurie et organisent des prières dans l’église malgré les interdictions.
1800-1900 (19ème siècle)
1800 : Une partie de l’église s’effondre, la chapelle de la Vierge est préservée
1803 : La municipalité établit une imposition extraordinaire pour reconstruire l’église
1806 : Redécouverte dans la bibliothèque d’un médecin à Blesle d’une copie de la « Charte de Laurie » dictée par le paysan de Lugarde en 1770.
1809 : Fin des travaux de reconstruction de la partie de l’église qui s’était effondrée quelques années plus tôt.
1833 : Le visage noir de la Vierge est repeint en rose. La statue disparaît sous des habits d’apparat destinés à l’honorer, mais également à dissimuler la misère de son état
1836 : La commune de Laurie compte 836 habitants au dernier recensement
1845 : L’abbé Fournier, curé de Laurie transcrit le texte de la Charte et la communique à l’évêque de Saint-Flour
L’Abbé Fournier érige un autel en bois à l’entrée de l’église pour mettre en valeur la statue de la Vierge (transféré à la chapelle d’Escrouzet en 1889)
1860-1868 : Lors d’une série de travaux de pavage du sol de l’église, le confessionnal est déplacé et laisse apparaître un placard rempli de béquilles et d’ex-voto très anciens.
Création du vitrail de l’Assomption de Marie dans la chapelle de la Vierge par le célèbre peintre verrier et mosaïste Clermontois Félix Gaudin.
1885 : Rétablissement de la lampe qui brulait constamment devant la statue de la Vierge bien avant la Révolution. Elle fonctionne aujourd’hui à l’électricité.
1886 : La marche de pèlerins de Blesle à Laurie le lundi de Pentecôte rassemble 200 personnes
1888 : Parution du premier livre consacré à l’histoire de la Vierge de Laurie et au pèlerinage par l’abbé Chabau.
1889 : Le 29 mai, jour de l’Ascension, le nouvel autel de la Vierge en marbre blanc de style néo-roman est consacré solennellement par Monseigneur Baduel, évêque de Saint-Flour, suite à une souscription paroissiale.
L’artiste peintre de Mauriac Eugène Laffage exécute les peintures couvrant tous les murs et la voûte de la chapelle de la Vierge
Vers la fin du siècle, une réplique de la statue avec son visage noir est fixée dans le déambulatoire de la basilique Saint-Julien de Brioude.
1900-2000 (20ème siècle)
1902 : Deux historiens publient dans la Revue de la Haute-Auvergne une étude qui révèle que la « Charte de Laurie » contient des erreurs historiques.
1903 : Le sanctuaire de Laurie est affilié à la Maison de Lorette lui assurant les mêmes faveurs spirituelles obtenues en se rendant à la basilique de Lorette.
1904 : Le Pape Pie X dote pour sept ans le sanctuaire de Laurie d’indulgences (rémission des péchés) pour les pèlerins qui s’y rendent.
Un moulage fait sur la Vierge de Laurie est placé dans le bas-côté-ouest de l’église Saint-Joseph à Clermont-Ferrand
1905 : Un acte administratif du Pape Pie X (Rescrit) du 25 janvier accorde le privilège du Couronnement à la Vierge de Laurie
Avec la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, l’église et la statue de la Vierge en Majesté deviennent propriétés communales.
La maladie et le décès de Monseigneur Lamouroux et les évènements provoqués par la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat retardent l’organisation du Couronnement.
1906 : L’Abbé Durif, curé chapelain de Laurie adresse une demande solennelle à l’évêque de Saint-Flour pour qu’il fixe la date du Couronnement à la Pentecôte 1907
1908 : Le 4 novembre, la statue de Notre-Dame de Laurie est classée parmi les monuments et objets historiques
1907 : L’évêque du Puy Thomas François autorise l’édition d’un petit livre sur Notre-Dame de Laurie et Notre-Dame de Gloire
1911 : Les évêques des Diocèses du Puy et de Saint-Flour fixent la date du Couronnement au lundi de Pentecôte 1912
1912 : Le 27 mai, lors du pèlerinage, la Vierge est couronnée en présence de 2000 pèlerins sous la présidence de Mgr Lecoeur, évêque de Saint-Flour, Mgr Belmont, évêque de Clermont, Mgr Boutry, évêque du Puy-en-Velay.
1915 : Le pèlerinage du lundi de Pentecôte accueille une grande foule marquée par l’angoisse de la guerre
1930 : 700 personnes participent au pèlerinage
1927 : Le 6 janvier, l’église de Laurie est inscrite aux Monuments historiques
1947 : 200 pèlerins de la paroisse de Molèdes participent au pèlerinage du lundi de Pentecôte
1950 : Restauration de l’église sous la direction des Monuments historiques
1952 : Restauration complète de la statue par un restaurateur agréé des Monuments historiques, mais qui ne tient pas compte totalement des impératifs des majestés auvergnates
1958 : Pose du nouveau vitrail réalisé par le maître verrier A. Bessac de Grenoble grâce aux dons des pèlerins. Il évoque la Vierge de Laurie dans ses habits d’apparat et le pèlerinage.
1959 : La statue est exposée à Aurillac dans le cadre de l’exposition « Orfèvrerie et statuaire romane ».
Pose du vitrail du Sacré Cœur réalisé par le maître verrier Antoine Bessac suite à une souscription paroissiale.
1962 : 1500 pèlerins participent le 16 juin au cinquantenaire du Couronnement sous la présidence de Mgr Pourchet, évêque de Saint-Flour, Mgr de la Chanonie, évêque de Clermont-Ferrand, Mgr Dozolme, évêque du Puy-en-Velay.
1963 : Découverte des Tumulus sur le plateau de Lair de Laurie attestant qu’à la protohistoire la région était déjà une terre sacrée.
1985 : Le 10 Octobre, le retable de l’Assomption (17ème siècle) est inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques
1987 : Le 75ème anniversaire du Couronnement rassemble plusieurs centaines de pèlerins le lundi de Pentecôte.
2012 : Restauration de la couronne de la Vierge par les ateliers spécialisés de la Maison Chevillard à Avrillé dans le Maine et Loire
27-28 juin : Les manifestations religieuses et culturelles du centenaire du Couronnement de la Vierge rassemblent près de 700 personnes
La Charte du voeu de Blesle dite "Charte de Laurie" est datée du 21 Avril 1318. Elle relate le voeu de la ville de Blesle de faire une procession annuelle pour obtenir la fin de la peste qui ravageait le pays. Mais celle connue aujourd’hui ne serait pas l’originale.
Dans l’étude de cette Charte en 1902, deux chercheurs Marcellin Boudet et Roger Gand apportent un certain nombre de précisions sur sa redécouverte, mais aussi et surtout sur son contenu : la Charte dite de Laurie contient de nombreuses erreurs historiques
En 1808, à la mort du Docteur Barrès à Blesle, on trouva dans sa bibliothèque une copie du titre original de la Charte de Laurie qui se trouvait dans le chartrier de l’abbaye de Blesle.
Le curé de Laurie, l’abbé Fournier, fit une copie de la Charte le 25 Octobre 1845 et la communiqua à l’évêque de Saint Flour accompagnée de remarques sur la transcription de la Charte. Car du document original point de trace, ni à Blesle, ni à Laurie.
Selon la tradition qu’il avait recueillie à Blesle, c’est un paysan nommé Philippe Basset, habitant le village de Lugarde au temps de Louis XV, qui, sans avoir fait des études, possédait le don de lire les vieux titres.
Le marquis de Chavagnac, seigneur de Blesle lui avait fait déchiffrer de vieux documents. Peu de temps avant la révolution, en 1770, cet homme aurait dicté sa lecture du titre de 1318 appelé "Charte de Laurie".
Dans la dernière moitié du 19ème siècle, malgré quelques points obscures, plusieurs écrivains ont présenté comme authentique la traduction française du paysan de Lugarde.
Et nos historiens de s’interroger sur l’existence même de cette charte, car, si en 1658, Jacques Branche dans un livre sur les pélerinages à la Vierge parle bien de Laurie, il ne signale pas l’existence de la Charte alors qu’il a enquêté à Blesle et à Laurie.
Autre fait troublant selon eux, il est bien étrange qu’un texte de cette importance ait échappé aux recherches des érudits qui ont sillonné l’Auvergne en tout sens au 17 et 18ème siècle et qui portaient toute leur attention aux archives des abbayes.
Leur explication est sans appel : "Cette pieuse supercherie émane d’un homme moins instruit que zélé, disent-ils, animé du désir de donner une origine officielle et le relief authentique d’une antiquité plus grande au pélerinage de Notre Dame de Laurie par un acte de fondation.
Il a mêlé à plaisir des ducs imaginaires du moyen-âge, des évêques, le roi, le Pape et tout ce qu’il a pu trouver de redoutable à l’époque comme la peste. L’auteur de la copie de la Charte a dO trouver dans le pays la traduction d’un voeu de la ville de Blesle à l’occasion d’une peste et il est parti de là pour bâtir la Charte que nous connaissons.."
De fait l’étude du document ne résiste pas à l’analyse historique et scientifique. Point de peste à cette période, pas de venue de Saint-Louis à Brioude comme le dit le document, l’évêque Odon signalé n’a jamais éxisté, la chronologie baronniale de la province est erronée...etc, etc. Pas de doute, la traduction de cette charte est douteuse.
Ceci étant dit, rien ne remet en cause l’existence d’une Charte primitive instituant une procession de Blesle à Laurie et la fidélité des habitants de Blesle pendant plusieurs siècles à cette procession du lundi de Pentecôte.
La Charte du voeu de Blesle dite "Charte de Laurie" est datée du 21 Avril 1318. Elle relate le voeu de la ville de Blesle de faire une procession annuelle pour obtenir la fin de la peste qui ravageait le pays.
Dans l’étude de cette Charte en 1902, deux chercheurs Marcellin Boudet et Roger Gand apportent un certain nombre de précisions sur sa redécouverte, mais aussi et surtout sur son contenu : la Charte dite de Laurie contient de nombreuses erreurs historiques
En 1808, à la mort du Docteur Barrès à Blesle, on trouva dans sa bibliothèque une copie du titre original de la Charte de Laurie qui se trouvait dans le chartrier de l’abbaye de Blesle.
Le curé de Laurie, l’abbé Fournier, fit une copie de la Charte le 25 Octobre 1845 et la communiqua à l’évêque de Saint Flour accompagnée de remarques sur la . transcription de la Charte. Car du document original point de trace, ni à Blesle, ni à Laurie.
Selon la tradition qu’il avait recueillie à Blesle, c’est un paysan nommé Philippe Basset, habitant le village de Lugarde au temps de Louis XV, qui, sans avoir fait des études, possédait le don de lire les vieux titres.
Le marquis de Chavagnac, seigneur de Blesle lui avait fait déchiffrer de vieux documents. Peu de temps avant la révolution, en 1770, cet homme aurait dicté sa lecture du titre de 1318. appele "Charte de Laurie".
Dans la dernière moitié du 19ème siècle, malgré quelques points obscures, plusieurs écrivains ont présenté comme authentique la traduction française du paysan de Lugarde.
Et nos historiens de s’interroger sur l’existence même de cette charte, car, si en 1658, Jacques Branche dans un livre sur les pélerinages à la Vierge parle bien de Laurie, il ne signale pas l’existence de la Charte alors qu’il a enquêté à Blesle et à Laurie.
Autre fait troublant selon eux, il est bien étrange qu’un texte de cette importance ait échappé aux recherches des érudits qui ont sillonné l’Auvergne en tout sens au 17 et 18ème siècle et qui portaient toute leur attention aux archives des abbayes.
Leur explication est sans appel : "Cette pieuse supercherie émane d’un homme moins instruit que zélé, disent-ils, animé du désir de donner une origine officielle et le relief authentique d’une antiquité plus grande au pélérinage de Notre Dame de Laurie par un acte de fondation.
Il a mêlé à plaisir des ducs imaginaires du moyen-âge, des évêques, le roi, le Pape et tout ce qu’il a pu trouver de redoutable à l’époque comme la peste. L’auteur de la copie de la Charte a dO trouver dans le pays la traduction d’un voeu de la ville de Blesle à l’occasion d’une peste et il est parti de là pour bâtir la Charte que nous connaissons.."
De fait l’étude du document ne résiste pas à l’analyse historique et scientifique.
Point de peste à cette période, pas de venue de Saint Louis à Brioude comme le dit le document, l’évêque Odon signalé n’a jamais existé, la chronologie baronniale de la province est érronée... etc, etc. Pas de doute, la traduction de cette charte est douteuse.
Ceci étant dit, rien ne remet en cause l’existence d’une Charte primitive instituant une procession de Blesle à Laurie et la fidélité des habitants de Blesle pendant plusieurs siècles à cette procession du lundi de Pentecôte.
Pendant plusieurs siècles des habitants de Blesle et des hameaux environnants ont parcouru à pied, le lundi de Pentecôte, les dix kilomètres qui séparent Blesle de Laurie pour perpétuer la tradition du voeu de 1318.
Le sentier de montagne parcouru chaque année par le groupe de pèlerins, n’est pas un chemin facile et il faut s’armer de courage pour entreprendre le parcours.
A partir du 19ème siècle, grâce à des témoignages, on sait comment se passait la marche des habitants de Blesle.
« La procession du lundi de Pentecôte partait de l’église Saint-Pierre de Blesle, passait près du donjon et le clocher Saint-Martin pour franchir la Voireuse sur le pont en dos d’âne du Martalou.
Le groupe s’engageait ensuite dans un chemin en lacets sur une pente assez raide, la côte de Lory.
La marche était ensuite plus aisée à travers la bruyère sur le plateau de La Chau jusqu’à la croix de Besse fleurie pour la circonstance par les habitants du village. Là, une courte halte permettait d’accueillir de nouveaux marcheurs venus des villages voisins de Pressac, Védrines, Le Cheylat...Le groupe renforcé partait alors en direction de Laurie, longeant les champs de blé puis serpentait à travers les pinèdes.
Ayant franchi un peu plus de la moitié du chemin, les pèlerins s’accordaient un moment de repos et s’offrait une collation. Une personne en profitait pour recueillir un peu d’argent pour payer la messe.
Le souffle repris, les marcheurs franchissaient la dernière étape à travers un terrain ou descentes et montées se succédaient jusqu’au plateau des Tumulus de Lair, personne n’imaginant que les amas de pierres en forme de cône éparpillés sur le site recouvraient des sépultures préhistoriques.
La dernière étape était la Croix d’Anliac, lieu de rencontre des habitants de Laurie, Auriac, Molèdes... et des pèlerins de Blesle.Après les salutations d’usage, le curé de Laurie remettait au curé de Blesle la clé de son église manifestant ainsi qu’il lui accordait toute liberté pour accomplir dans le sanctuaire les actes liturgiques prévus au programme du pèlerinage. Puis la procession s’ébranlait vers l’église au son des cloches et des cantiques.
Le retour vers Blesle en fin d’après-midi se faisait habituellement de façon très détendue. La dernière halte avait lieu au Montignac avant d’entreprendre la descente de la Côte de Lory. Chacun finissait ses provisions tandis que des jeunes créaient une ambiance de fête. »(
Emile Armabessaire, Laurie 1977. Extraits)
En ce début du XXIème siècle, cette marche traditionnelle n’existe pratiquement plus.
En 1905 le Pape autorisa le privilège du Couronnement de la Vierge de Laurie, ayant été durant plusieurs siècles l’objet d’un culte fervent. Le couronnement n’eut lieu que sept ans plus tard.
La fête du Couronnement de la Vierge de Laurie fut retardée par la maladie et la mort de l’évêque de Saint-Flour. Quant à son remplaçant, il eu à faire face dès son arrivée aux transformations de son diocèse rendues nécessaires par la loi de Séparation de l’Eglise et de l’Etat.
En 1912. Mgr Lecoeur fixa enfin la date du Couronnement au 27 Mai, lundi de Pentecôte. Manifestant tout l’intérêt qu’il portait à la cérémonie et souhaitant lui donner un grand retentissement en Auvergne, il fit lire une lettre pastorale dans toutes les églises du Cantal. Elle fut aussi reproduite dans "Les semaines religieuses", les revues des diocèses limitrophes de Clermont et du Puy.
La fête du Couronnement ne pouvait se dérouler dans la petite église de Laurie ou n’aurait pu pénétrer qu’un très petit nombre de pélerins. Pas question d’occuper la place du village pour une manifestation religieuse, la loi de Séparation de l’Eglise et de l’Etat l’interdisant.
Le diocèse possédait une immense tente appelée "Abri de Jeanne d’Arc" qu’on achemina donc de Saint-Flour à Laurie à l’aide d’attelages prêtés par des habitants de Blesle. On l’installa dans un champs privé en contre-bas du bourg et au-dessus de la route reliant Laurie à Riol d’Auriac.
Le 27 Mai, Laurie connue l’un de ses plus grands jours. Les trois évêques d’Auvergne avaient fait le déplacement. Une soixantaine de prêtres accompagnaient un peu plus de 2000 pélerins, du jamais vu dans aucun des pélerinages du lundi de Pentecôte.
Tandis que la procession se dirigeait vers l’abri Jeanne d’Arc, la foule chantait sur l’air de l’Ave Maria un cantique spécialement composé pour l’occasion
La statue de la Vierge était portée par quatre prêtres revêtus de dalmatiques, riches tuniques à manches longues, insignes de l’ordre des diacres.
Le curé de Blesle portait sur un coussin les couronnes d’or destinées à la Vierge et à l’enfant Jésus. La fanfare de Blesle jouait ses meilleurs morceaux.
L’abri Jeanne d’Arc ne pouvait accueillir à la messe pontificale à peine la moitié des pélerins. On releva les cotés afin que tous puissent suivre la cérémonie du rite du Couronnement par les trois évêques d’Auvergne.
Après une longue messe, les prières et les allocutions de circonstance, ce fut pour tous le repas champêtre. Un grange accueilla les personnalités.
L’après-midi on se rendit en procession de la place à l’abri Jeanne d’Arc. Plusieurs orateurs prirent la parole après le Salut au Saint Sacrement et les évêques bénirent la foule des pélerins.
Une dernière procession raccompagna la Vierge couronnée en sa chapelle de l’église paroissiale qui fut jusqu’au soir trop petite pour recevoir les pélerins, émus et probablement surpris par les couronnes d’or.
Le couronnement de Notre-Dame de Laurie à laissé des souvenirs vivaces dans la mémoire collective des habitants du Pays de Sianne.
Au fil des siècles, la petite église de Laurie a été le lieu d’expression de bien des souffrances et de bien des misères, mais également de tous les espoirs. Les témoignages de piété et de reconnaissance des croyants marquent encore les murs de la chapelle de la Vierge.
Cet usage du dépôt d´objet dans les sanctuaires était déjà une pratique courante dans la Gaule. L´habitude de fixe des ex-voto s´est développée surtout dans les églises et chapelles dédiées à la Vierge Marie.<br>
Les plus anciens ex-voto en matériaux fragiles ont été détruits lors des travaux de rénovation de l´église de Laurie à la fin du 19ème siècle comme les nombreuses béquilles découvertes à la même époque cachées derrière le confessionnal.
L´ ex-voto, expression de la dévotion
L´usage de mettre des objets ou des plaques en marbre blanc dans les lieux consacrés, en accomplissement d´un voeu pour soi ou pour une personne proche, en reconnaissance d´une grâce obtenue... n´est pas une pratique exclusive des chrétiens.
Durant la haute-antiquité les soldats après les combats déposaient dans les temples leurs glaives ou leurs boucliers, tous les athlètes faisaient les mêmes gestes en suspendant leurs trophées, le petit peuple y déposait des objets de la vie quotidienne ou des reproductions des parties du corps guéries par l´intervention divine.
Depuis la nuit des temps, la matérialisation de la dévotion s´est exprimée d´abord par des graffitis votifs puis par des ex-voto. A Laurie, ils étaient autrefois beaucoup plus nombreux ? Les ex-voto visibles aujourd´hui sur le mur latéral du sanctuaire ont tous été posés depuis les travaux d´embellissement de l´église en 1889.
Les coeurs ex-voto
Dans tous les lieux de pèlerinage les remerciements des fidèles s´exprimaient parfois par des coeurs en métal doré ou argenté plus ou moins ornés de gravures et d´incrustations de dessins. Laurie n´échappe pas à cette tradition. Creux à l´intérieur les coeurs ex-voto pouvaient contenir un message ou une prière, le nom des personnes recommandées à Marie.
Marie, médiatrice du plaidoyer
L(intercession de la Vierge auprès de son fils Jésus est demandée par les croyants pour des situations de maladie, de souffrance, d´abandon, les épreuves de la vie, mais aussi pour des remerciements, pour une guérison, un évènement marquant...
Depuis des siècles on vient à Laurie avec ferveur poser un acte de foi en confiance, et si l´on ne peut pas se déplacer pour le pèlerinage alors on confie à un pèlerin ses intentions de prières car pour les catholiques, Marie est la médiatrice du plaidoyer auprès de Dieu.
Evidemment on n´est pas obligé de croire aux guérisons obtenues par l´intercession de la Vierge et estimer que la médecine ne peut les expliquer. Pourtant il faut reconnaître que le « potentiel thérapeutique de la prière » est de plus en plus pris au sérieux par de nombreux médecins attestant d´un lien étroit entre la santé et la foi spirituelle. Il est difficile de nier l´existence d´une relation étroite entre le corps et l´esprit.
A Laurie comme dans la plupart des antiques pèlerinages chrétiens à la Vierge, le culte marial est sorti d’une source. Tout aurait commencé au XII ème siècle autour d’une source au lieu-dit Le Martulet, dominant la vallée de la Sianne, près d’une villa gallo-romaine.
Une prairie communale possédait une source bienfaisante qui ne tarissait jamais. La tradition orale recueillie par écrit en 1646 raconte qu´une statue de la Vierge était honorée depuis quelque temps en ce lieu. Par la suite, dans des conditions mystérieuses, la statue fut transportée à la fontaine du Roulier, située à mi-chemin entre le hameau de Jureuge et le bourg de Laurie. On l´installa dans une niche en pierre bâtie à côté de la source. Elle resta là de nombreuses années avant d´être transférée dans l´église paroissiale de Laurie, un endroit plus facile pour les dévotions.
C´est ce que disait le Père Jacques Branche en 1646 lorsqu´il vint à Laurie et publia par la suite un livre sur les pèlerinages à la Vierge Marie en Auvergne.
Cette statue a-t-elle suivi un tel itinéraire ? Aucun texte ne vient étayer cette tradition orale. Mais après tout pourquoi pas. La notoriété de la Vierge grandissant il était certes plus facile d´organiser des dévotions et de tirer tout le bénéfice spirituel et temporel dans une chapelle au milieu d´un village.
D´autre part un pèlerinage prenait son importance a une époque ou l´Eglise catholique relançait le culte marial et suscitait une réflexion théologique face au rejet progressif des protestants du rôle de Marie.
Une pratique commune en Pays devenu chrétien
Les Gaulois honoraient l´eau des sources et des puits. Lorsque le christianisme est apparu en Auvergne, il n´abolit point les anciens usages mais les conserva, se contentant se substituer un culte nouveau au culte ancien. D´indéniables et mystérieuses affinités existent entre Marie, la Mère de Jésus, et la pureté des sources.
La création d´un sanctuaire chrétien en Pays de Sianne s´explique aussi par le fait que la région recèle de nombreux Tumulus, sépultures des hommes de la préhistoire, témoignages que bien des lieux alentours étaient déjà depuis la nuit des temps une terre sacrée.
Par ailleurs, les travaux archéologiques récents, notamment ceux dits paiens dans la région. On peut citer le plateau Saint-Victor près de Massiac, ou encore le site de Véyrines non loin d´Allanche qui a accueilli un sanctuaire Celtique dédié à une divinité des eaux durant la période gallo-romaine.
Durant plusieurs siècles la statue de la Vierge en majesté de Laurie avait le visage noirci. L’on sait aujourd’hui qu’elle fut peinte comme beaucoup d’autres statues de l’époque romane.
Le Massif Central a compté une soixantaine de statues mariales noircies, d´iconographies très diverses et plus particulièrement le Cantal. Toutes ces statues offraient à la dévotion des fidèles un visage uniformément sombre. Pour beaucoup de croyants, les Vierges noires ont représenté une réalité symbolique, elles ne pouvaient pas s´incarner dans une personne connue, ou à un style social, elles étaient pour tous, chacun pouvait s´y retrouver.
En 1550, un recensement dans le Royaume de France dénombrait alors 190 Vierges noires, en 1945 une étude d´Emile Saillens en recensait 205, dont beaucoup de facture récente, copies d´effigies plus anciennes ayant disparu.
Tous les spécialistes s´accordent pour dire qu´à l´origine les statues romanes de la Vierge étaient polychromes, un certain nombre d´entre-elles ont été peintes en noir entre la fin du Moyen-Age et la fin du 19ème siècle. <br>
Cette transformation a augmenté la renommée des statues et leur puissance miraculeuse et attiré de plus grandes foules de pèlerins dans les sanctuaires.
Le culte de la Vierge noire n´a pas eu d´effet sur l´évolution de l´Eglise catholique et sur ses fondements. La couleur noire a simplement participé à la dévotion. L´histoire et l´ethnographie montrent l´attachement des croyants à ces effigies noires, régulièrement repeintes ou recrées.
La Vierge de Laurie, une Vierge noire
Selon le témoignage écrit du Prieur de l´Abbaye de Prébac (Haute-Loire) en 1636, la Vierge en majesté de Laurie avait le visage noirci depuis de nombreuses années. C´est en 1833 que la statue à retrouvé son aspect d´origine. Il n´existe aucune image du visage noir de la statue de la Vierge de Laurie.
A Laurie comme dans d´autres sanctuaires mariaux les statues de la Vierge au visage noirci sont apparues à des générations de pèlerins ignorant tout des Majestés romanes assises sur leur trône, masquées par un manteau d´apparat. Ce fut le cas à Laurie durant plus d´un siècle. Il est donc compréhensible que certaines reproductions d´images de la Vierge de Laurie reproduisent sous cette forme une Vierge noire au manteau. La mémoire collective a gardé très longtemps cette vision.
Les Vierges noires sont porteuse d´un mode de pensée et d´un légendaire au même titre que le culte adressé aux saints ou aux fontaines miraculeuses.
Pourquoi des Vierges noires
Pour bon nombre d´historiens, les Vierges noires n´existent pas dans l´absolu. Il n´y a que des Vierges au teint occidental qui ont subi un noircissement accidentel ou volontaire à différentes époques offrant toutefois une diversité de visages. Différentes hypothèses scientifiques ou historiques partagent les spécialistes sur le visage noir des statues notamment des Vierges en majesté.
Hypothèses scientifiques :
-oxydation des lamelles en cuivre ou en argent qui recouvrait certaines statues
-action de certains produits chimiques (sels de plomb, colorants...)
-fumée des cierges entourant les statues
-rituel fréquent de lavage avec différents liquides (vin, huile...)
-coloration volontaire à l´aide d´une peinture noire
-noircissement dû au temps et aux lieux d´exposition de la statue
Hypothèse historiques :
-parenté des Vierges en majesté avec la déesse-mère de l´âge préhistorique
-Déesse celtique référence aux divinités chtoniennes, déesses noires dont le culte se rendait dans les grottes avant la conquête de la Gaule par les Romains.
-référence à la représentation de la déesse Gaulois Belisama
-noircissement des Vierges en majesté sous l´influence des miniatures syriennes, les icônes byzantines de la Vierge au teint bronzé comme celui des femmes de Palestine
Aucun texte ne précise la date à laquelle la Vierge de Laurie fut recouverte d’un riche et ample manteau brodé. On sait toutefois qu’au milieu du 19ème siècle elle disparut sous de riches étoffes. La robe était rouge et l’enveloppait entièrement. Une capuche bleue encadrait le visage et descendait jusqu’au socle.
La coutume de l´habillement d´une Vierge couronnée ou non est une pratique chrétienne répandue principalement dans le monde catholique depuis le XVIème siècle. Vêtir une statue lors d´une fête où d´un pèlerinage lui conférait un aspect encore plus vénérable.
Plusieurs statues mémorables de l´art sacré en Auvergne ont été habillées. L´habillement d´une statue s´inscrivait également dans une volonté des paroisses d´individualiser la Vierge à son village. Cela représentait un geste fort de piété, une volonté de donner à la mère du Christ une position de Reine.
La tradition de vêtir les statues serait antérieure au christianisme, et remonterait même à l´Antiquité, à une période où l´on habillait les représentations des divinités.
Un vestiaire de fête
Les cartes postales et l´iconographie pieuse du début du XXème siècle montrent la statue de Laurie avec ses différents habits de fête. Le vestiaire de la Vierge de Laurie semble avoir toujours été composé d´une robe-tablier orné de feuillages et de fleurs, rehaussée par la fleur de lys, symbole marial où par un coeur.
Le manteau-cape porté également comme un voile et qui enveloppe la statue de la tête jusqu´aux pieds lui donnant une forme conique est parcouru par une branche-liane fleurie et bordé d´une frange doré. L´enfant Jésus porte lui une sorte de bavoir peu élégant ne laissant apparaître que sa tête.
Si certaines statues prestigieuses comme la Vierge du Puy-en-Velay possédaient une véritable garde-robe composée d´étoffes scintillants changés au gré du temps, des fêtes et de la liturgie, Notre-Dame de Laurie ne fut jamais parée de costumes prestigieux. D´après l´iconographie parvenue jusqu´à nous, elle aurait eu deux ou trois vêtements d´apparat.
Des vêtements qui resteront modestes
Malgré sa renommée en Auvergne, la madone de Laurie était donc recouverte de vêtements beaux, mais modestes, mais qui lui donnait une certaine présence, presque théâtrale, et tellement humaine avec son sourire.
L´habillement de la Vierge de Laurie lui aura donc donné pendant plus d´un siècle une tout autre apparence avec ce manteau conique. Traditionnellement de petite taille, une Vierge en majesté habillée devient méconnaissable. Cela tient à ce qu´elle est une sculpture en position assise alors qu´on l´habille comme si elle est débout.
La plupart des images pieuses du début du XXème siècle la représente toujours en habit d´apparat, tout comme le vitrail du pèlerinage daté de 1958, situé sous la tribune de l´église.
Les informations sur la provenance de la précieuse parure de la Vierge de Laurie sont aujourd´hui perdues. A-t-elle été brodée par des femmes du pays, offerte par des pèlerins, réalisée par une communauté religieuse d´Auvergne comme cela a été souvent le cas pour d´autres statues du Cantal ? Aucun texte d´archive n´a été découvert pour répondre à ces questions
L´habillement des statues : Sens spirituel mais contre sens artistique
Une vierge en majesté couronnée et habillée est un non sens au plan artistique pour ce type d´oeuvre médiévale conçue à l´origine comme statue-reliquaire représentant la vierge assise avec l´enfant Jésus placé dans son giron. <br>
Mais pour les croyants, la statuaire religieuse est plus qu´une représentation, elle donne également du sens au dogme mariale qui a évolué au fil des siècles. La Vierge de Laurie est pour les croyants catholique signe et porteuse d´un message de foi marqué par son époque. Et il est probable que dans l´avenir l´Eglise catholique lui donnera de nouveaux signes pour exprimer l´actualité de sa foi sans renier pour autant la valeur artistique de l´objet vénéré.
La châsse-thabor néo-gothique de la fin 19ème en laiton et bronze qui abrite la Vierge en majesté est placée en permanence sur le tabernacle de l’autel néo-roman, participant à la valorisation du lieu symbolique du pèlerinage.
Un écrin d´orfèvrerie néo-gothique<br>
pour magnifier la Vierge dans son sanctuaire
Cette imposante châsse-thabor, élément traditionnel d´un maître-autel, rehausse le caractère symbolique de la statue médiévale tout en accentuant son aspect unique.
La châsse-thabor de Laurie adopte sur ses quatre faces la forme de l´entrée d´une église néo-gothique miniature. Quatre colonnettes-chandeliers ornées d´un noeud central, surmontées par un chapiteau ouvragé supportent un clocher pointu terminé par une croix. Le toit à quatre versants est décoré d´un motif imitant la tuile.
Protéger le patrimoine religieux<br>
pour transmettre un héritage
Probablement un réemploi, l´oeuvre d´art sert aussi de protection depuis un aménagement sous le contrôle des Monuments historiques par un artisan de Blesle en 1976. Derrière un coffre vitré par balle de 25mm à l´épreuve du vol ou des dégradations, la Vierge s´offre en toute sécurité dans sa chapelle à la dévotion des croyants et au regard des amateurs du patrimoine et de l´art sacré.
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
<br>
Détails de la châsse-thabor
Chaque année, lors du pèlerinage du lundi de Pentecôte, les cérémonies religieuses débutent à la croix d’Anliac qui surplombe le village de Laurie. Ici sont accueillis les marcheurs venus de Blesle par une marche traditionnelle qui se termine par une procession pour rejoindre l’église.
La croix en fonte noire dressée sur le bord de la route de Lussaud qui surplombe le bourg de Laurie ressemble à la plupart des croix de chemin encore très nombreuses dans la vallée de la Sianne. Le modèle est commun pour son époque et reconnaissable par son style de la fin du 19ème siècle.
La croix est implantée dans un virage où il est difficile de s´arrêter. Au regard de l´histoire le lieu n’est pas anodin puisqu´il se trouve au carrefour d´un chemin qui file vers le plateau de Lair et au-delà vers Blesle. Nous sommes à l´aboutissement du chemin du pèlerinage emprunté tous les Lundis de Pentecôte depuis plusieurs siècles par les pèlerins venus de Blesle.
Le jour du pèlerinage un rite immuable s´accomplit ici, celui de l´accueil des marcheurs partis tôt de Blesle pour participer aux cérémonies.
Ce jour là, des habitants de Laurie viennent à leur rencontre pour remettre à l´un des marcheurs (autrefois le curé de Blesle) les clés de l´église de Laurie manifestant par cet acte symbolique la mise à disposition du sanctuaire de la Vierge pour accomplir le voeu de leurs ancêtres.
La renommée de la Vierge en majesté de Laurie et le pèlerinage du Lundi de Pentecôte ont dépassé très tôt les limites de la vallée de la Sianne et du département du Cantal pour atteindre toute l’Auvergne : Brioude, Clermont-Ferrand, Quézac...
Présence marquante dans la basilique Saint-Julien de Brioude
Dans la basilique Saint-Julien-de-Brioude la statue de Notre-Dame de Laurie se tient toujours dans le déambulatoire au milieu d´ex-voto.
Notre-Dame de Laurie dans la capitale de l´Auvergne
Le culte de la Vierge en majesté de Laurie existait déjà au 15ème siècle à Clermont-Ferrand. En effet, depuis 1483, les Chanoines de l´abbaye de Chantoin, un faubourg au nord de la ville auvergnate, avait la responsabilité spirituelle et matérielle de l´église de Laurie pourtant dans le Cantal. Ils propagèrent la dévotion à cette Vierge des montagnes dans leur monastère.
Au début du 20ème siècle, un moulage de la statue de Laurie pris place dans un oratoire sur le côté ouest de l´église Saint-Joseph construire en pleine époque de renouveau du pèlerinage de Laurie. La statue a disparu de l´église aujourd´hui. Il nous reste une photographie du petit oratoire derrière une grille en fer forgé (1905).
La fresque murale de l´église de Quézac (Cantal)
L´église de Quézac dans le sud du Canal est entièrement décorée de fresques murales dédiées au culte marial en France et dans le Cantal, réalisées en 1925 par le célèbre peintre Toulousain Jean Ningres. Le style de Ningres est inspiré de l´Art Nouveau et par le vocabulaire narratif néo-médiéval influencé par des références à Gauguin.
La Vierge de Laurie ainsi qu’une maquette de l´église de Laurie portée par un ange sont représentées dans l´une des fresques murales.
La statuaire religieuse produira en Auvergne d´autres représentations en plâtre de la Vierge de Laurie au visage traditionnel noir que l´on retrouve dans certaines églises et chez des particuliers.
Il y a plusieurs siècles déjà, la petite chapelle du hameau du Bru (Charmensac) était un lieu de pèlerinage le 25 juillet, jour de la Saint-Jacques. De très nombreux habitants des communes environnantes y participaient. Aujourd’hui ce rendez-vous traditionnel tombe peu à peu dans l’oubli.
Autrefois le 25 juillet, après une messe solennelle en plein air devant la chapelle, s’organisait une procession, la statue de Saint-Jacques était portée par des jeunes hommes sur un brancard fleuri. Elle était précédée par la bannière de Saint-Jacques
Pour l’occasion on fixait quatre rubans tenus par des pèlerins qui selon un usage très ancien avaient acquis aux enchères cette place d’honneur.
Au pèlerinage du 25 Juillet, on conduisait à l’église les petits enfants pour obtenir de Saint-Jacques une marche assurée. On présentait les infirmes aux prêtres qui appelaient sur eux la guérison par des prières et des supplications.
Les pèlerins ne manquaient jamais de prendre avec eux du vin, afin qu’il soit bénit. Il était conservé précieusement et donné aux malades durant l’année.
A d’autres périodes de l’année, la population des alentours venait parfois en procession à la chapelle pour demander à Saint-Jacques la fin d’une épidémie, le retour de la pluie ou de bonnes récoltes.
Il y a quelques années encore, le dimanche qui suivait le 25 Juillet, subsistait une cérémonie à la chapelle du Bru, comprenant une bénédiction des enfants, suivie d’une procession jusqu’à la croix dressée au centre du village. La statue de Saint-Jacques le jeune et les bannières traditionnelles étaient portées par des jeunes.
La relique de Saint-Jacques, protégée dans un présentoir doré, était exposée aux fidèles durant la cérémonie. (Les photos de cet article restituent l’une des dernières processions de la Saint-Jacques en 2009)
Le reliquaire de saint-Jacques
Le reliquaire de Saint-Jacques conservé à la chapelle se présente sous la forme d’un quadrilobe en métal doré de 17 centimètres de diamètre. Un support articulé permet de l’exposer verticalement ou de le présenter à la vénération des fidèles.
La relique de taille infime, est mise en valeur par deux tiges florales et par un phylactère qui porte le nom de Saint-Jacques.